Jeux de conduite en milieu urbain

15 Octobre 2021
Des chercheurs du Pôle de Recherche National (PRN) Automation, dirigés par Alessandro Zanardi de l'ETH Zurich, ont étudié comment les véhicules autonomes pourraient devenir de meilleurs usagers de la route dans un environnement urbain. Le résultat est à la fois étonnamment simple et compliqué.
Cars in traffic.

Dans un monde où les véhicules à conduite autonome représentent une part toujours plus importante du trafic routier, les algorithmes deviennent un facteur de plus en plus important pour la sécurité routière. Les environnements urbains, avec leurs différents moyens de transport public, leurs rues animées et leurs nombreux piétons, constituent un défi particulier. Avec ce qu'ils appellent les jeux de conduite en milieu urbain, les chercheurs du PRN Automation, dirigés par Alessandro Zanardi de l'ETH Zurich, ont étudié comment les véhicules autonomes pourraient devenir de meilleurs conducteurs dans une version simplifiée de cet environnement. Leurs résultats ont été publiés dans la revue IEEE Robotics and Automation Letters.

 Les véhicules autonomes actuels sont trop passifs

"Ces dernières années, de nombreuses vidéos de véhicules autonomes aux performances très médiocres sont devenues virales sur les réseaux sociaux. Par exemple, ils attendent sans fin et ne parviennent pas à s'insérer sur l'autoroute", explique Alessandro Zanardi, premier auteur de l'étude et doctorant à l'ETH Zurich. La raison probable de ce phénomène, selon le chercheur, est que les algorithmes actuels de planification des mouvements pour les véhicules autonomes ont tendance à produire des comportements "passifs" sur les routes. "Par exemple, un véhicule prédit d'abord les actions des autres et planifie ensuite en conséquence autour d'eux", explique Zanardi. "Il serait toutefois préférable que la procédure de prise de décision prenne directement en compte la façon dont les autres véhicules réagissent à nos décisions." Pour le démontrer, l'équipe a considéré les interactions quotidiennes des véhicules du point de vue de la théorie des jeux. Cela signifie que les véhicules sont intéressés par des objectifs personnels, tels que se rendre à une certaine destination et respecter les règles de circulation. En outre, et c'est le plus important, ils suivent également des intérêts "communautaires" - comme ne pas se heurter les uns aux autres - que l'on attendrait de tout conducteur rationnel.

Alessandro Zanardi est doctorant à l'Institut des systèmes dynamiques et de contrôle de l'ETH Zurich.
Alessandro Zanardi est doctorant à l'Institut des systèmes dynamiques et de contrôle de l'ETH Zurich.

Une "anarchie" efficace et perfectible

"Pour la première fois, nous avons pu montrer que si les véhicules suivent ces règles simples, ils deviennent des conducteurs très efficaces du point de vue de la communauté. Tout comme si les conducteurs pouvaient se parler et se coordonner", explique M. Zanardi. Bien qu'il ne soit pas totalement inattendu, puisqu'il repose sur ce que le chercheur appelle une "intuition", ce résultat est tout de même assez remarquable. Auparavant, les études menées dans le domaine des véhicules autonomes faisaient souvent état de résultats indésirables lorsque les conducteurs agissaient par intérêt personnel, quelle que soit la rationalité de leur comportement.

Ce résultat prometteur doit toutefois être pris avec des pincettes. "Pour pouvoir mettre en œuvre ce résultat issu de la théorie des jeux dans le monde réel, nous devons tenir compte d'un facteur très important : l'incertitude", explique M. Zanardi. Il est impossible de prévoir parfaitement comment les autres conducteurs, en particulier les humains, réagissent aux actions d'un conducteur. Il faut donc prévoir une marge d'erreur. Surtout dans un environnement où les plus petites erreurs peuvent provoquer de graves accidents.

Lisez l'étude scientifique complète ici : https://ieeexplore.ieee.org/document/9385938